mardi 13 octobre 2009

La bête


Et puis d’un seul coup il y a eu cette image. Que cette image. Un corps pendu dans la salle où devait avoir lieu le procès. Soutenance insoutenable de thèse contre les thèses. Le vide. La mort.
Une image qui restait comme la seule. Qui s’imposait – occupait – toute – la place. Tout l’espace. Du dedans du dehors. Plus rien. Que cette image.
De quoi ? De quoi, puisqu’il n’y avait plus rien. Dans le tunnel, plus rien. Que la mort. Partout. Le procès. Le procès de l’esprit maudit. Du corps amputé. Absenté.
Alors la respiration. Forte. Très forte. De plus en plus forte. Trop forte. Beaucoup trop forte. Bruyante. De plus en plus bruyante. Le râle de la bête qu’on mène à l’abattoir. Le râle de la bête qu’on mène à l’abattoir et qui le sait. Et qui râle, à défaut de pouvoir faire, autrement, autre chose, quelque chose.
Alors la tête sans corps a été rappelée –pas à l’ordre, au fait, au réel, au corps. Le corps est entré dans la bataille pour dire qu’il ne partirait plus, qu’il ne laisserait plus, qu’il ne laisserait plus la tête coupée en paix, jamais, plus jamais.
Le corps a dit qu’il n’y avait que
lui, qu’il n’y avait plus que
lui, qu’il n’y aurait plus que
lui.
Le corps et son râle inhumain.
La respiration folle laissant sortir une voix tout aussi informe et folle, du bruit, du bruit juste sorti des ténèbres des entrailles révulsées, révoltées. Et après cette folie de cette respiration déchaînée, de cette voix relevant du cri de la bête qu’on abat, tout le corps. Tout le corps s’est mis à trembler, à claquer, dans le silence, dans le seul bruit du corps qui bat. Tout le corps convulsé, révulsé, dans la paradoxale tétanie de la mort.

Les voyageurs du train ont eu peur. Ils ne comprenaient pas. Ils ne comprenaient pas ce qu’ils voyaient. Tout comme ne se comprenait pas ce qui se vivait. La révolte du corps, dans le face à face avec la mort.
Ils ont fait arrêter le train. En pleine voie. Interrogé la bête. Qui ne pouvait répondre, qui ne pouvait donner sens, qui ne pouvait faire sens. Qui était : la bête. Qui pouvait juste dire « non, ce n’est pas une crise d’asthme ». La bête hors du sens. La bête, seul corps à se manifester. La bête. Soumise à la question du sens. Quel sens ? Le non-sens absolu. Un corps. Juste un corps.
A la sortie du train les pompiers étaient là. Pourquoi ? La peur. La peur des yeux qui avaient vu. La bête. Et aussi peut-être, avoir pensé que les pompiers pouvaient venir à bout de cet incendie. Incendie de l’intérieur. Incendie de viscères.



La bestia

Y de repente no hubo más que esta imagen. Nada más que esta imagen. Un cuerpo colgado en la sala donde tenía que tenerse el proceso. Defensa indefensable de tesis en contra de las tesis. El vacío. La muerte.
Una imagen que quedaba como única. Que se imponía – ocupaba – todo – el espacio. Todo el espacio. De dentro de fuera. Nada más. Que esta imagen.
¿De qué? ¿De qué?, ya que no quedaba nada. Dentro del túnel, nada. Nada más que la muerte. Por todas partes. El proceso. El proceso de la mente maldita. Del cuerpo amputado. Ausentado.
Entonces la respiración. Fuerte. Muy fuerte. Cada vez más fuerte. Demasiado fuerte. Mucho demasiado fuerte. Ruidosa. Cada vez más ruidosa. El estertor de la bestia que se lleva al matadero. El estertor de la bestia que se lleva al matadero y que lo sabe. Y que tiene estertor, ya que no puede, hacer otra cosa, alguna cosa, lo que sea.
Entonces la cabeza sin cuerpo fue llamada de nuevo –no al orden, al hecho, a lo real, al cuerpo. El cuerpo entró en la batalla para decir que no se iría más, que no dejaría más, que no dejaría más en paz la cabeza cortada, nunca, nunca más.
El cuerpo dijo que no había más que
él, que no quedaba más que
él, que no quedaría más que
él.
El cuerpo y su estertor inhumano.
La respiración loca dejando escaparse una voz tan informe y loca, ruido, ruido justo salido de las tinieblas de las entrañas trastornadas, sublevadas. Y después de esta respiración desencadenada, de la voz que era más bien grito de bestia que se sacrifica, todo el cuerpo. Todo el cuerpo se puso a temblar, a reventar, en el silencio, en el solo ruido del cuerpo que late. Todo el cuerpo convulsazo, trastornado, en la paradójica tetania de la muerte.

Los viajeros del tren tuvieron miedo. No lo entendían. No entendían lo que veían. Igual que no se entendía lo que se vivía. La rebelión del cuerpo en el cara a cara con la muerte.
Pararon el tren. En medio de la vía. Interrogaron a la bestia. Que no podía contestar, que no podía dar sentido, que no podía hacer sentido. Que era: la bestia. Que sólo podía decir «no, no es una crisis de asma». La bestia fuera del sentido. La bestia, solo cuerpo que se manifiesta. La bestia. Sometida a la cuestión del sentido. ¿Qué sentido? El no-sentido absoluto. Un cuerpo. Nada más que un cuerpo.
A la salida del tren estaban los bomberos. ¿Por qué? El miedo. El miedo de los ojos que habían visto. La bestia. Y también tal vez, haber pensado que los bomberos podían dar con este incendio. Incendio interior. Incendio de vísceras.

dimanche 4 octobre 2009

Esther Khan


"J'voulais savoir quelle impression ça fait quand la vie pénettre en vous parce que je sentais rien, je savais rien. Maintenant, tout m'arrive, très fort, ça brule chaque nerf de mon corps, c'est comme une boucherie, tout rentre à l'intérieur de moi et je suis tout arrachée. J'ai l'impression de mourir et que ça n'arrête jamais. Comment vous faites, si vous sentez la vie tout le temps ? J'le crois pas. J'pense que vous faites semblant. Parce que sinon, ça fait tellement mal, que vous hurleriez. J'préférais comme c'était avant. Vivement qu'ça s'arrête. Tu crois que ça va s'arrêter ? C'est mieux quand on est enfermé. Il faut jamais rien connaître. C'est pas bon de savoir. C'est que de la merde. Tu m'avais menti."

Esther Khan, Arnaud Despléchin (d'après Arthur Symons)




"Quería saber qué impresión da cuando la vida le penetra a uno porque no sentía nada, no sabía nada. Ahora, me pasa todo, muy fuerte, quema cada nervio de mi cuerpo, es igual que una carnicería, todo entra adentro mío y me quedo toda arrancada. Me da la sensasión de estar muriendo y que no para nunca. ¿Cómo hacen ustedes, si sienten la vida a cada rato? No lo creo. Pienso que están fingiendo. Porque sino, duele tanto, que estarían aullando. Prefería como era antes. Ojalá se pare. ¿Te creés que va a parar? Es mejor cuando está uno encerrado. No hay que conocer nada. No está bueno saber. No es más que mierda. Me mentiste."

Esther Kahn, Arnaud Despléchin (basado en Arthur Symons)